Elle peut être adoptée pour réduire l’usage des herbicides, amener un nouveau levier d’action sur l’exploitation… Les raisons de s’intéresser à la herse étrille sont multiples. Toutefois, pour réussir, cette technique doit être adossée à une approche agronomique globale et reposer sur une solide capacité d'adaptation.
La herse étrille, peut-être y avez-vous pensé ? Car les céréaliers en conventionnel disposent d’une chance, celle de pouvoir intégrer des outils issus de la bio sans perdre de vue la souplesse et la sécurité permises par la chimie si besoin.
Toutefois, dans un système comme dans l’autre, un prérequis est incontournable, celui qui impose d’avoir une approche agronomique globale de gestion des adventices.
« Avant d'investir dans du matériel, il est indispensable de travailler sur l'ensemble des leviers agronomiques pour accompagner l'utilisation de ces outils dont l'efficacité seule est inférieure à celle d'un herbicide », souligne Jérôme Pernel, chargé de mission systèmes de production innovants à Agro-Transfert Ressources et Territoires, plateforme d'application et réseau de transfert des innovations agronomiques basée en Hauts-de-France.
Utiliser une herse étrille nécessite aussi d’acquérir de nouveaux réflexes. Les conditions optimales de passage diffèrent en effet de celles requises pour le pulvérisateur.
En premier lieu l'état de la surface du sol : celui-ci doit être bien nivelé pour garantir la régularité du travail de la herse, et suffisamment ressuyé. Attention également, une trop forte quantité de résidus en surface qui pourraient subir l’effet râteau de la herse. Les broyer au préalablefacilitera le passage de l’outil.
Par ailleurs, l’état propice du sol doit être considéré au moment de l'intervention, mais aussi les jours à venir. Ainsi, les trois jours qui suivent ne doivent pas être pluvieux afin que les racines d'adventices exposées à l'air puissent sécher. La pluie est d’ailleurs le frein majeur pour positionner les passages de herse en automne dans les céréales à paille. Les régions les plus pluvieuses à cette période seront ainsi particulièrement défavorisées pour parvenir à les positionner correctement.
Avantage de la herse en revanche lors des conditions ventées, qui ne sont pas une contrainte en désherbage mécanique.
Autre point de contraste avec les traitements pulvé, l'heure d'intervention durant la journée. Nul besoin de se lever à l’aube : la herse étrille sera plus efficace leschaudes après-midi, pour ne pas casser les plantes.
Doser son agressivité
Pour ne pas perturber la jeune culture, une profondeur de semis légèrement supérieure à la normale et régulière est alors conseillée. Une densité de semis supérieure également vise à compenser les pertes de plantes de 10 à 15% dues aux passages de herse étrille.
Puis l'anticipation est de rigueur pour obtenir une bonne efficacité de désherbage. Pas question donc d'intervenir sur des adventices trop développées. C’est leur stade qui doit piloter le moment des interventions.« Lorsque les adventices sont bien visibles, il est souvent trop tard», signale Jérôme Pernel.
Un premier passage 3 à 5 jours après le semis, « à l’aveugle », est préconisé pour éliminer les adventices en germination, c’est le stade « fil blanc ». La herse est passée à faible agressivité et à une vitesse de 6 à 10 km/h.
Les passages suivants interviennent ensuite au gré des relevées d'adventices. Le réglage de l'agressivité de la herse est alors fonction du stade de la culture et des adventices : un compromis doit ainsi être trouvé pour ne pas arracher excessivement la céréale, tout en restant efficace pour éradiquer les adventices.
C’est l'inclinaison des dents qui permet de régler l'agressivité : elle sera d'autant plus forte que les dents seront droites. La vitesse de passage renforce également l'agressivité. Retenir que plus la vitesse sera élevée et plus les projections de terre pourront couvrir la culture.
De 3 feuilles à épi un centimètre de la céréale, il est conseillé de ne pas dépasser les 3 à 6 km/h. Les passages, de 4 à 6 km/h, peuvent intervenir ensuite jusqu'à la montaison, tant que le salissement le nécessite. L’agressivité pourra être plus importante au tallage que sur les stades 2-3 feuilles.
Enfin, repérer les adventices sur lesquelles la herse montrera une efficacité limitée : cas des folles avoines notamment, aptes à germer depuis une profondeur de sol importante. La herse ne sera pas non plus utilisée pour gérer les vivaces. En revanche, les résultats sont très bons sur les vulpins ou ray-grass.
Jérôme Pernel conclut :« Adopter le désherbage mécanique en système conventionnel nécessite de s'adapter et de profiter des opportunités.Il faut envisager plusieurs possibilités lorsque l'on élabore ses stratégies, et choisir la plus adaptée aux conditions de l'année. Le désherbage mécanique ne doit pas être réalisé à tout prix si les circonstances ne s'y prêtent pas. »
Souplesse permise avec les herbicides
Si les conditions se révèlent inadaptées à la herse étrille, ou si les adventices sont trop développées il faudra alors prévoir un rattrapage chimique.
Sources : Agro-Transfert